Mais elle est où la justice ? Selon plusieurs, elle n’existe pas ou, à tout le moins, elle n’est pas égale pour tout le monde. Pourtant, dans son Palais, elle est assise sur un trône avec un glaive dans sa main droite et une balance dans sa main gauche. La balance est immobile alors que le glaive est droit et impitoyable. En cela, elle représente l’équilibre entre les forces antagonistes qui nous habitent tous et toutes. Elle est notre conscience à son niveau le plus élevé: ceux qui ont utilisé à tort leurs pouvoirs ne méritent que la rigueur de la condamnation exécutée par le glaive; pour les autres, la balance sauvegarde l’équilibre, l’organisation du chaos en eux-mêmes et dans le monde.
Quant à lui, le juste serait le fondement du monde selon plusieurs textes anciens sacrés. En cela, il pense avec poids, donne sa place à chaque chose, il ordonne avec mesure. En tant que fonction organisatrice, il est au-delà des oppositions et contraires, il réalise en lui l’unité. Ignorant la division du temps, il appartient à l’éternité qui est une et totale. Puissance cosmique, il est une colonne qui relie le haut et le bas. Enfin, il symbolise l’homme parfait.
En somme, autour de nous, tout est signe et tout signe est porteur de sens. Comme il est dit, ‘’ Symboliser, c’est vivre ensemble’’. Alors, la pensée symbolique qui vit en chacun de nous est ‘’ une explosion de l’univers multiple en percevant l’unité de ce multiple.’’ En scrutant les symboles, nous trouvons le sens profond des choses et percevons notre réalité dans une nouvelle lumière. Il en est ainsi pour les notions de justice, de juste, de juge et de judiciaire.
Dans ce contexte plus terre à terre, nous pourrions considérer l’acte de justice comme impersonnel, immédiat et équivalent. Il est impersonnel en cela qu’il s’appuie sur la même trame pour tous, indépendammant des fortunes, statut social ou ‘’contacts’’. Il est immédiat car il doit être rendu au plus près des actes reprochés avec le minimum de délai. Il est équivalent parce que la peine encourue doit égaler la teneur des délits.
Cet idéal ne se retrouve que rarement dans les jugements connus. C’est que dans tous les cas, il y a une négociation préalable entre les avocats des deux parties pour devancer le juge et lui proposer un ‘’consensus’’. Et le juge y va de ses commentaires pour cautionner que justice a été rendue ou que le résultat proposé peut porter préjudice à la Justice. Ne pas oublier que les postes vacants de juge sont comblés sous l’autorité du parti politique au pouvoir. Sans être méchant, on peut supposer qu’on ne mord pas la main qui nourrit.
Autre chose à savoir, c’est qu’on ne parle plus des délits mais seulement si les clients ont reçu une représentation ou une défense pleine et entière. Dans ce contexte, si une cause penche vers une partie, c’est que l’avocat a été habile et que l’autre a mal fait son travail.
Et ce, sans considérer certains échanges de bon aloi entre les avocats. Que le délit soit un vol, un viol ou un meurtre, la procédure est la même.
Pour le juriste, il est important de connaître la loi et surtout le nonobstant de chaque article. Car, si la loi est pour les citoyens, le nonobstant et la jurisprudence sont essentiels pour les avocats dans leur travail et pour préparer leur plaidoirie. Et il y a toujours les délais au procès qui, s’ils sont au-delà de ce que la loi dicte, peuvent rendre un dossier périmé et faire en sorte qu’un procès n’a plus sa raison d’être.
En somme, et pour conclure, elle est où la justice ? Elle n’existe plus, remplacée par le judiciaire qui en est un pâle reflet. Il est où le juste ? Il a été remplacé par des avocats et un juge qui orchestrent une mise en scène parfois obsolète où les figurants ont de moins en moins de crédibilité. Le tout est un spectacle coûteux et qui ne règle rien parce qu’il évite de répondre aux symboles créateurs de l’ordre. Il finit par soutenir la matrice et le chaos.
Le Fou Du Village