L’Autre Joue

On a souvent entendu parler d’une joue qui avait été frappée. Cette histoire est liée à celle de Jésus, à son enseignement qui avait insisté sur le fait de présenter l’autre joue à notre agresseur. Cette dernière fut témoin de la scène avant, pendant et après. Pourtant, elle est comme ignorée. On ne la consulte d’aucune façon et certains  supposent qu’elle aurait pu recevoir le même sort. Qu’en était-il alors ? Le fou et elle étant hors de la grande Histoire, ils avaient des affinités, des points communs. Ils pouvaient se parler et surtout se comprendre. Alors, qu’ont-t-ils pu se raconter ? 

On imagine seulement que la réaction n’est pas coutumière et peut être perçue comme une provocation, attirant le même sort à l’autre joue. Surtout si la situation est vraiment tendue et que l’assaillant est encore dans tous ses états, que l’agressé arbore un p’tit sourire.  La suite de l’histoire ne semble pas avoir eu cet aboutissement. 

Toutefois, on peut imaginer que cette attitude confond l’agresseur au point qu’il va devoir évaluer son geste. Cet écart de sa part n’a vraiment pas déstabilisé son vis-à-vis. Son geste traduit bien un malaise mais on en sait pas davantage: sa nature, son origine, le but visé. Et tout ça reste sans réponse pour l’un comme pour l’autre. Des développements vont devoir être engagés si l’on veut que la relation se poursuive. Quelqu’un a perdu patience, n’a pas eu le contrôle de ses nerfs . Son comportement n’était pas acceptable mais n’affecte en rien la qualité de la personne.

 Par ailleurs, l’agressé était suffisamment sûr de lui-même qu’il ne craignait  pas du tout la suite. Il était resté centré sur lui-même et ne voyait pas la pertinence de répondre. Peut-être avait-il une part de responsabilité dans l’événement ? Peut-être ne voyait-il pas la pertinence d’aggraver la situation au risque de perdre davantage ? Le silence était  sa meilleure arme.

Enfin, pour se battre il faut être deux ou plusieurs. En ne répondant pas ‘’oeil pour oeil, dent pour dent ‘’, l’autre reste seul avec le problème qu’il a créé. Il doit identifier ce qui s’est passé pour ne plus le reproduire et ce qu’il doit faire pour préserver le contact avec l’autre.  Et  cela même si c’est un étranger car par  l’interconnexion que nous avons tous, ce que je fais à l’autre finit par m’affecter personnellement que j’en sois conscient ou non.

Toute cette histoire des deux joues peut être transposée dans notre quotidien de tous les jours. Combien de fois avons-nous été affectés par les comportements, les paroles des autres qu’on trouvait inacceptables et qui nous créaient des problèmes. Bien sûr, il ne s’agit pas de tout gober sans rien dire. Il faut donner une suite à tout écart  et en rechercher le sens pour nous comme pour l’autre. Car, il est à parier que j’avais raison mais que l’autre n’avait  pas tort dans la même situation. 

Dans les cas extrêmes, il est toutefois  important d’assurer sa sécurité et de ne pas alimenter le feu. On dit que parfois le salut est dans l’évitement ou la fuite. Et pour me guider, je me souviens ce qu’un ancien m’avait dit: ‘’ C’est pas parce qu’un chien t’a mordu que tu dois te mettre à quatre pattes  et courir après ‘’. 

Le Fou Du Village