…la progression et notre condition

Comme son frère le progrès, la progression est une marche en avant, un ‘’avancement’’ sans interruption ou presque. Seulement, par les résultats acquis, on peut parler d’une réelle différence. Dans le cas de la progression, on envisage un enrichissement, une gradation, un vrai ‘’profit’’, mais sur un autre plan. C’est une augmentation progressive, graduelle et lente. On peut alors parler d’une marche véritable par degrés observés, souvent désirés, prévus. Et surtout, sauf exception, on n’assiste guère à un mouvement rapide, hardi et libre de toute contrainte comme dans le cas  d’un véritable essor.

Dans la progression, il y a vraiment une harmonie qui s’installe chez l’Homme: corps, esprit et âme.  Si l’on veut parler en langage moderne, on dirait entre émotions et sentiments, pensée et réflexion,  volonté et actions ou réalisations. Les émotions donnent l’énergie nécessaire pour qu’il y ait une manifestation quelconque; la pensée, elle, permet un plan, un ‘’blueprint”; l’action assure la matérialisation. Et chaque  composante a son propre langage. L’allégorie donne  une image au-delà des mots, une vision d’ensemble; les concepts et la logique fournissent une vision de la réalité qui est la clarification pour soi et les autres dans la transmission et le langage; quant au corps,  les comportements sont l’aboutissement nécessaire de toute création. Et voilà ce qui permet un équilibre dans la volonté, cette intention d’être. On ne peut s’isoler dans l’une de ces composantes sans nuire à l’équilibre de l’ensemble que nous sommes, humains. Et nous avons  l’illustration de ceci  dans différents mouvements tels le sentimentalisme qui peut mener à une sensiblerie; le rationalisme qui mène à un retrait dans tout ce que nous pouvons concevoir, sans plus; dans l’attitude d’un surhomme qui ne voit aucune limite dans ses actions et réalisations.

Souvent, le dépassement se résume à une accumulation d’avoirs, à une domination de ce qui nous résiste. Il doit y avoir une uniformité en tout sous notre propre modèle, étant la référence unique acceptable. Et c’est là un non-respect de l’économie de la nature qui exige pour la survie un nombre suffisant d’individus, selon une réelle diversité et non une uniformité,  une collaboration et non une dominance d’un groupe sur les autres. Il nous faut développer l’être et non l’avoir, la qualité et non la seule quantité, le sacré et non le profane.

Sur un autre plan plus subtil, nous pouvons parler de ‘’vertus’’ que nous devons acquérir pour contrer notre penchant naturel à la méchanceté, à la mélancolie. Ainsi, on nous parlait de foi qui est un autre mode de connaissance; de charité qui est une expression d’amour inconditionnel; d’espérance et de patience qui sont  des conditions essentielles à l’action et les réalisations. En somme, tout repose sur un éveil de la conscience, le respect de notre nature transcendante, le droit qui est l’expression de la justice, le travail en verticalité et non seulement en horizontalité. Pour ce, tout doit reposer sur l’ordre et non le chaos, sur une évolution vers un terme idéal jamais complètement atteint. 

Pour conclure, on a fini par confondre progrès et progression qui est une référence à notre essence, à un développement moral des individus, garant d’un  changement d’état à un degré supérieur pour la personne et la communauté. De fait, d’une ascension réelle, on a ‘’passé’’ au progrès en favorisant la forme sur le fond, le matériel sur le ‘’spirituel’’. L’homme est devenu un consommateur de biens pour oublier ce qui peut faire un bonheur durable.

 Le fou du village