Les inconnu(e)s s’invitent

Une jeune femme de la ville s’était déplacée pour venir fouiner dans notre village. Très volubile, elle expliquait qu’elle avait connu plusieurs villes, sinon de pays. Et son rêve serait de visiter le monde. C’est alors que le Fou l’a invitée à demeurer chez nous car nous avons ici tout ce qui existe: terre, eau, air et feu. À voir le regard urbain de la visiteuse, nous avions le miroir parfait de l’insignifiance qu’elle attribuait à son interlocuteur. Et celui-ci d’ajouter que tout était une question de dosage de ces éléments et de leur configuration. Ailleurs, ce n’est que différent, rien de plus. Comme souvent dans des situations similaires: la dame avait raison mais le Fou n’avait surtout pas tort.

Dans bien des écoles de pensée il est dit que nous devons voir la vie à partir du présent et de la réalité. Mais qu’en est-il ? De plus en plus, on considère le temps comme étant une construction, rien de plus. Étant observé, mesuré et quantifié, il est devenu prévisible. Alors, il est devenu concret,  ‘’matériel’’. Or, un nouveau temps s’est invité à la sauvette: cosmique et plutôt ‘’spirituel’’. Ici, les passés, présents et futurs coexistent sans une séquence fixe et se présentent dans une logique nouvelle qui défie le temps lui-même: la durée s’étend à l’infini, éternelle;  tout s’influence mutuellement et peut être modifié.

La réalité aussi n’est plus pareille. Elle était réputée fixe, statique et la même pour tous. Elle se construisait à partir de nos organes des sens et était ‘’séparée’’ de l’observateur qui la définissait facilement, en avait le contrôle. Le consensus était facile à faire et ceux qui en doutaient étaient rejetés. Puis, une nouvelle réalité fut sollicitée de plus en plus, dynamique, variable et personnelle. Tout est devenu énergie et l’observer est impossible sans en faire partie intégrante: l’observateur et l’observé étant indissociables. Finie la belle objectivité quand tout est subjectif. Chacun créant sa réalité, elle n’est plus la même pour tous. Trop variable, on pourrait affirmer qu’il n’y a pas de véritable réalité.

Par ailleurs, Il est dit qu’au début, Dieu donna à l’Homme le rôle de gardien de sa création. Pour rendre possible cette tâche, Il lui présenta toute chose en précisant leur nom et leur fonction. Fort de cette connaissance innée, l’Homme avait une idée juste sur tout. Et pour assurer ce pacte entre le Créateur et lui, l’Homme pouvait se nourrir de l’Arbre de vie pour maintenir ce lien précieux. Selon l’archétype du départ, le Féminin et le Masculin avaient chacun leur rôle et étaient essentiels à la pérennité de la vie: la ‘’femme’’ était la ‘’matrice’’ et assurait un rôle d’école vivante; le masculin était porteur de la semence, était l’autorité vivante. À voir ce que nous observons aujourd’hui, principalement en Occident, il est facile de constater qu’on ne se retrouve plus dans ces schémas qui nous apparaissent obsolètes. Mais, qu’en est-il des résultats, sommes-nous en meilleure posture ?

Enfin, avec le temps, nos sciences et technologies ont suffisamment évolué pour faire envie même aux gens venus d’ailleurs. L’atome et ses utilisations; le génome humain nous livrant ses codes et rendant possibles les organismes génétiquement modifiés etc. tout cela nous a séduit par notre pouvoir sur tout et qui ne fait que progresser. Mais, une science sans conscience est-elle garante d’un équilibre, de bonheur et sécurité accrus, pour nous et l’univers entier ? Surtout depuis que nous développons de nouvelles grilles physiques qui ne peuvent plus accueillir les grilles éthériques, rendant ainsi la pérennité incertaine. 

Le fou du village